Clifford Ross : l'élégance et la force de la nature

La galerie Philippe Perrin présente jusqu'au 23 octobre et pour la première fois en France, les photographies de l'artiste américain Clifford Ross, dans une exposition intitulée : " Waves & Steel". Avec son appareil photo sophistiqué, Clifford Ross réussit à capter l'âme de l'océan : étonnant.

A l'heure où la météo automnale se précise, j'ai eu l'envie d'un petit retour à l'esprit des vacances. Et ça tombe bien car la galerie Perrin, grand spécialiste du mobilier en acier, a eu la bonne idée de faire dialoguer son mobilier avec les étonnantes photos maritimes de Clifford Ross. Mais après tout, entre les arabesques du mobilier XVIIe et la vague d'un océan furieux, il y a peut-être un point commun. Première surprise : la galerie Perrin est située à 30 mètres du ministère de l'intérieur et quasiment en face du palais de l'Elysée. Pour un air de vacances... Je pousse la porte à la découverte du dompteur de vagues : Clifford Ross. Je suis accueilli par un grand type mince au large sourire : le directeur, antiquaire. Je fais la visite en sa compagnie et j'apprends que l'artiste a commencé par être peintre et sculpteur, avant de se lancer avec succès dans la photographie au milieu des années 1990 et de continuer, ce qui est plutôt une bonne idée, la preuve :

Clifford Ross : Hurricane LX, 2014. Archival Pigment Print. Clifford Ross studio, all rights reserved.

Le cœur de l'océan

Tout de suite je vois une photo très grand format d'une grande beauté. Cela s'explique par la technique bien particulière utilisée par l'artiste. Il s'attache ou un assistant le retient avec une corde et il va au plus près des rouleaux afin d'exprimer la majesté incontestable des vagues, mais aussi son ressenti face à une nature si forte. La photo, que j'admire longuement, fait partie de la série Hurricane (1998 - 2002 – 2008 - 2014), qui a été prise à Long Island (New York). Retenu par des cordes, immergé jusqu'à la taille, Clifford Ross affronte les éléments avec une prédilection pour les jours d'ouragan ou de fortes tempêtes. A l'arrivée : cette photo où tout y est : le tirage exceptionnel de précision, la colère de l'océan mais aussi son extraordinaire sensualité.

Clifford Ross : Hurricane LII, 2014. Archival Pigment Print. Clifford Ross studio, all rights reserved.

Bien appareillé

Je poursuis ma visite. La qualité des photos de Clifford Ross est telle que les moindres détails sont restitués. Du point de vue de la technique photographique, certaines photos ne se sont pas faites si facilement que cela. Très vite, le photographe a été confronté, si j'en crois le dossier de presse," aux limites techniques des appareils à sa disposition". Il invente donc son propre appareil constitué d'éléments d'une vielle caméra militaire de 1943 utilisée pour des prises aériennes. L'engin pèse près de 55 kilos et mesure 1,80 m de hauteur. Il ressemblerait aux premiers appareils photo en accordéon. Mais il permet surtout d'obtenir des images d'une très haute résolution, 2,6 giga, beaucoup plus que les appareils numériques classiques. Ce drôle d'engin crée par Clifford Ross aurait attiré l'attention de la Nasa. Mais ce procédé d'obtention serait si précis et minutieux, que le photographe ne pourrait réaliser que huit images par an. En ce qui me concerne, c’est surtout l'émotion, l'élégance, la beauté, la menace que dégagent ces photos qui me surprend. Bien sûr, Clifford Ross utilise aussi des appareils plus modernes, mais toujours au creux de la vague, il y tient. Le résultat est là et laisse le passionné de la mer que je suis, bouche bée.

Clifford Ross : Hurricane L. Archival Pigment Print. Clifford Ross studio, all rights reserved.

Un homme au creux de la vague

Clifford Ross est né à New York en 1952. En 1974, il obtient son baccalauréat en arts et histoire de l'art à l'université de Yale. Ross commence réellement la photographie vers 1994. A partir de 2002, non seulement il photographie les vagues mais aussi les montagnes, une autre de ses passions. En 2010, il réalise une vidéo intitulée : Harmonium montagne. Il réalise, en 2009, une grande paroie de verre façon vitrail, pour le tribunal Fédéral d'Austin (Texas). L'œuvre de Clifford Ross a été exposée dans des galeries, des musées (MOMA, MET, SOLOMON R GUGGENHEIM) aux Etats-Unis, mais aussi en Europe, Brésil et Chine.

Hommage à la mère Nature

Je continue ma petite visite avec Philippe Perrin pour guide. L’exposition se poursuit au premier étage. Je passe devant un lit rarissime en acier, entouré de quelques photos de forêt en couleur de Clifford Ross : toujours la même passion pour la nature. Nous arrivons dans une grande salle où sont présentés quelques sièges et des photos de vagues de Ross. Je me demande comment il fait pour rendre aussi bien la violence sensuelle et radicale de l'océan. Chaque photo est un hymne à la nature et l'acceptation de cette domination, par conséquent c’est aussi un questionnement sur la fragilité humaine. Mais ça, c'est une autre histoire...

Clifford Ross : Hurricane XVI, 2014. Archival Pigment Print. Clifford Ross studio, all rights reserved.

L' acier et l'écume des vagues

Avant de partir je jette un coup d'œil à ce fauteuil en acier poli : belle silhouette. C’est Napoléon qui donne un coup de pouce à ce type de mobilier en précisant : "Mon intention est que ma tente soit toujours contenue dans un seul fourgon... Faites une chose commode, forte, légère". Les artisans développèrent donc des meubles pouvant se plier. Le métal se révéla un matériau parfaitement adapté à la création de ce type de mobilier modulaire. J'observe cet élégant fauteuil du début XIXe siècle. Curieux, il m'évoque le design des années 50 (voir article sur ce blog).

Fauteuil en acier poli, début du XIXe siècle. Courtesy galerie Philippe Perrin.

Encore un regard aux vagues fascinantes de Clifford Ross. Je remarque aussi quelques très petits formats où la surface des flots est une véritable dentelle.